La salle des Machines

F Cavalli.Source Enciclopedia italiana di scienze, lettere ed arti, éd. Istituto Giovanni Trecani (1931).
F Cavalli.Source Enciclopedia italiana di scienze, lettere ed arti, éd. Istituto Giovanni Trecani (1931).

Source : Pierre Gandar

La salle de spectacles des Tuileries

La salle de spectacle du château des Tuileries a été édifiée en même temps que le Palais des Tuileries, et Louis Le Vau, en tant qu’architecte, et Gaspare Vigarani comme ingénieur et machiniste, en furent chargés. A l’époque, la cour ne disposait d’aucune salle de spectacles musicaux : seule existait la salle du Palais Royal, ouverte en 1641, mais elle était dévolue au théâtre.

Le résultat de cette collaboration fut une salle démesurée, sans aucun doute la plus grande d’Europe à l’époque, puisqu’elle pouvait contenir jusqu’à 7000 spectateurs (l’actuel Opéra Bastille, deuxième plus grande salle d’opéra au monde après le Metropolitan Opera de New York, ne peut accueillir aujourd’hui que 3800 spectateurs environ) !

La représentation inaugurale de cette salle, qui devait être donnée pour célébrer le mariage de Louis XIV, a finalement eu lieu deux ans plus tard, le 7 février 1662 en raison de retards dus à la production du spectacle. C’est Ercole Amante (Hercule Amoureux), de Francesco Cavalli qui a été joué à cette occasion.

Si la machinerie impressionnante et les décors somptueux ont été admirés, l’acoustique s’est révélée désastreuse. Il faut aussi dire qu’Ercole Amante a été donné en italien, que le public fort nombreux ne pouvait comprendre, provoquant un désintérêt vis-à-vis de l’intrigue et accentuant les habitudes dissipées d’un public alors plutôt bavard pendant les spectacles.

La salle des Tuileries a, de ce fait, été peu utilisée pendant une longue période, voyant tout de même à cette époque une des rares créations de son histoire : Les Elémens de André Cardinal Destouches. Des ballets sont aussi fréquemment donnés entre 1738 et 1760, mettant à profit la machinerie au service de cet autre art majeur royal, d’où son surnom alors acquis de « salle des machines ».

Avec la mort de Molière le 17 février 1673, Lully parvient à récupérer la salle du Palais Royal au bénéfice de l’académie royale de musique, salle de théâtre qu’il transformera afin de pouvoir loger les musiciens à l’orchestre.

La musique ne retrouvera que rarement le chemin des Tuileries jusqu’à l’incendie de la salle du Palais Royal, survenu le 6 avril 1763. La salle des Tuileries sera alors complètement transformée par Jacques Germain Soufflot (l’architecte du Panthéon) à qui on devait déjà le Grand Théâtre de Lyon.

La salle des Tuileries, remaniée par Soufflot, comportait alors environ 1500 places et l’espace disponible a permis d’améliorer le confort des spectateurs ainsi que l’acoustique. Cette salle connut alors un bref âge d’or musical de sept ans, inauguré par une reprise de Castor et Pollux de Jean-Philippe Rameau.

Cet âge d’or a pris fin en 1770 lorsque l’académie nationale de musique regagna le palais royal où l’attendait un beau théâtre tout neuf. La « salle des machines » a ensuite été utilisée de manière temporaire pour toutes sortes d'usages : théâtre ou salle de spectacles, lieu politique sous la convention ou le directoire, lieu de débats du Conseil d’État...