L'histoire, c'est un conte de faits...(Franck Dhumes)

Château des Tuileries, sous Napoléon III. Source : Gilles Brémond
Réunion des Tuileries et du Louvre. (Source : Gilles Brémond)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cher(e)s visiteur(euse)s,

 

Ce site n'a pas de prétention historique et le rédacteur a conscience en toute modestie qu'il apprendra beaucoup de certains de ses lecteurs. Le site est avant tout un levier au service des objectifs de l'association "Bâtisseurs des Tuileries"( déclarée en 2003) 

 

Il offre, en général, de manière chronologique une série d’histoires, de faits, ayant un point commun entre eux : le château des Tuileries. C'est lui qui sert de décor à une mise en scène historique, dont la majorité des acteurs sont des rois, des reines, des régicides, des usurpateurs (à défaut d'avoir installé une dynastie durable - n'oublions pas que Hugues Capet a été aussi considéré comme un usurpateur). J'espère que vous serez plus que spectateur de la vie de ces êtres d'exception ; ensemble nous essaierons d'entrer dans leur univers, voire leur intimité.

 

Parfois, vous entendrez aussi le peuple. Jamais invité au château, puissant, terrifiant, tonnant, terrible, immense, impitoyable, réclamant son pain, la liberté et la justice, il débarque pour détrôner. "Comme un fleuve refoulé par une marée d'équinoxe, avec un long mugissement" ; rien ne l'arrête !

 

Souvent manipulé, de persécuté il devient persécuteur, envahissant ce château réputé maudit, portant malchance à ceux qui y ont vécu.

 

L'histoire du château est abordée en s'intéressant aux contextes, à la personnalité et à la vie des principales figures qui ont eu un lien avec lui. Tout en collant aux conjonctures passées, le but est de raconter des scènes pour vous distraire, tout en espérant vous sensibiliser aux objectifs de l'association.

 

Mérimée écrivait dans la chronique du règne de Charles IX, "je n'aime dans l'histoire que les anecdotes". 

 

Je pense que cet avis est partagé par une grande majorité de visiteurs de ce site. Aussi, pour rendre plus facile la lecture, la rédaction tiendra compte du fait que les "petites histoires" donnent du charme au texte ; voilà ce qui a fait le succès du roman historique.

 

Le premier personnage qui a marqué l'histoire de ce palais n’y a pas résidé : la fascinante, l’obscure, la ténébreuse Catherine de Médicis.

 

En des temps incertains où le pouvoir royal vacille, elle décide en 1564, non loin du Louvre, la construction d'un palais suburbain, de type renaissance. Alors qu'elle assume la régence du royaume, il est probable que ce projet prestigieux vise entre autres à rehausser l'aura de la dynastie des Valois. Catherine est une Médicis, lignée pour laquelle la magnificence d'une réalisation artistique est au service de la politique. Il entre vraisemblablement dans les objectifs de la reine mère, de transmettre à la postérité un chef-d'œuvre architectural auquel son nom serait lié.

 

C’est par elle que la malédiction sur le château serait advenue. Elle se serait adonnée aux pratiques magiques, entourée de thaumaturges, de cabalistes, de sorciers, de mages, en un âge où les croyances liées aux superstitions sont courantes. On raconte qu'elle portait posés contre son cœur, des signes cabalistiques protecteurs, tracés par un nécromant, sur la peau d'un enfant non baptisé, égorgé lors d'une messe noire. Forcément une nuit de pleine lune !

 

Le second à qui le château doit sa renaissance, même s’il ne l’a pas habité, est le médiatique Henri IV. En réunissant le Louvre et les Tuileries, par une galerie de 450 mètres longeant la Seine (la "grande galerie au bord de l'eau") ce roi inspire à ses successeurs le "Grand dessein". Ce dernier est un défi : élever une galerie parallèle à la précédente, pour rejoindre par le Nord, les deux palais. Deux siècles et demi seront nécessaires pour mener à bien cette réalisation.

 

La première à résider au château des Tuileries a été Anne-Marie-Louise d'Orléans, dite la «Grande Mademoiselle», cousine de Louis XIV. La Grande Mademoiselle ! première à y vivre et première à en être chassée. Exceptionnelle, tout est grand en elle ! Grande dans la vanité jusqu'à témérairement oser défier les troupes du  grand roi (encore un enfant) et faire des Tuileries un repaire de conspirateurs contre la régente Anne d’Autriche  ; grande par son immense fortune, cette riche héritière sera grandement spoliée par son royal cousin. Pour ne pas déchoir, elle ne pouvait qu'épouser Louis XIV, ou tout au moins un roi !  Mais grande amoureuse, oubliant son rang, sous les quolibets de la Cour, elle se jettera  au pied d'un misérable "cadet de Gascogne", sans fortune, et avide d’aventures féminines. Elle sera grandement trahie par ce tout petit monsieur, indigne de son amour infini, et à qui elle a tout sacrifié, biens, honneurs, renommées. Enfin, délaissant l'époux volage, retirée du monde, humble dans son abandon dans l’amour divin, elle se grandit une dernière fois dans l’amour de Dieu.

 

Et l'historien G. Lenotre de nous raconter cette anecdote :

 

"Quand elle fut décédée, en 1693, à l’âge de soixante-six ans, le roi commanda des funérailles solennelles. Le cœur de la défunte, scellé dans une urne d’argent, devait être porté aux Célestins ; probablement mal embaumé, ce cœur qui avait tant aimé fit, pendant la veillée funèbre, éclater avec un tel bruit le vase où il était renfermé, que les dames, les prêtres et tout ce qui gardait le corps, s’enfuirent en grande épouvante et pensèrent s’étouffer aux portes en une bousculade affolée". 

 

En 1793, lors de la profanation des sépultures royales, l'architecte Louis-François Petit-Radel, s'empare de l'urne reliquaire contenant le cœur et le vend à des des peintres qui recherchaient précieuse substance issue de l'embaumement, dite "mummie". Pour les peintres, la mummie apportait après préparation  un glacis unique aux peintures à l'huile. De nombreux tableaux ont ainsi été peint pendant la révolution avec les cœurs des membres de la famille royale !

 

Délaissé par les rois aux profits d'autres palais, principalement celui de Versailles à partir de 1682, paradoxalement le château des Tuileries, demeuré résidence royale, devient symboliquement le siège du pouvoir à partir du moment où la révolution y amène de force le 6 octobre 1789, Louis XVI et sa famille.

Versailles devenu en quelques heures un rêve inaccessible  !

 

Pauline de Tourzel, fille de la Gouvernante du Dauphin raconte son arrivée au château " Les meubles les plus nécessaires y manquaient ; ceux qui s'y trouvaient étaient délabrés ; les tapisseries étaient vieilles et fanées. Les appartements étaient mal éclairés au moment où nous y entrâmes. Tout y respirait un sentiment de tristesse en harmonie avec les sentiments que nous y apportions après cette douloureuse journée".

 

 En pénétrant dans le château des Tuileries, le Dauphin porté dans les bras de sa Gouvernante, Madame de Tourzel mère s'étonne :

 

 

"Maman tout est bien laid" ; Marie-Antoinette de lui répondre " Mon fils Louis XIV y logeait bien, nous ne devons pas être plus difficile que lui".

 

Les Tuileries ! Prison pour une monarchie moribonde, anti chambre de la mort !
Marie-Antoinette intuitivement l'avait senti, quand pénétrant dans le palais, elle s'était mise à trembler.

 

 

 

Alors que le Dauphin est conduit vers un lit d'appoint, Madame Elizabeth, la sœur du roi s'inquiète en voyant la pâleur de la reine :

 

"Ma sœur, vous vous sentez mal?"

 

La souveraine à peine audible dans un murmure de répondre :

 

" J'ai froid, c'est comme si j'entrais dans un tombeau".

 

  

Pour le Peuple, les Tuileries sont l'antre de la tyrannie. Dans cette immense geôle, Louis XVI et Marie-Antoinette y ont rendez-vous avec un destin tragique. Tenture mortuaire, le château sert de toile de fond funèbre, face à la guillotine dressée pour leur dernier supplice.

 

Funèbres elles le sont aussi pour l’enfant-roi, titré pour son malheur, Louis XVII, par un froid mois de janvier 1793, dans la sinistre prison du Temple. Il est le premier enfant que le château oblige à expier impitoyablement pour "sa race". Vengeance acharnée allant jusqu'à rendre impossible au petit martyr le repos du cimetière des rois.

 

La monarchie abolie, la convention nationale emménage en mai 1793 dans la résidence des rois, devenue palais national. Elle s'installe dans l'ancienne salle des spectacles du château, réaménagée pour donner à la représentation nationale la scène et la solennité qui convenaient à des débats passionnels pleins "de bruit et de fureur". Pendant trente mois, les différentes factions régicides issues de la révolution vont s'y affronter sans pitié,  tentant de s’y éliminer, au nom de la Liberté, de l’Égalité et de la Fraternité. Enfin est arrivé le général Bonaparte, sifflant la fin de la partie, avant de finir lui-même sur la touche.

 

Incarnant la réussite, d'autres l'ont suivi, trop heureux eux aussi de s’installer dans l’illustre demeure : impitoyable le château les a tous rejetés. Chassé, alors qu'ils pensaient écrire l'histoire de France, chacun d'eux a maudit cette résidence des maléfices.

 

Il n’y a rien de nouveau sous le soleil ! Leur vie contient toutes les machinations dont un romancier a besoin pour captiver un lecteur : pouvoir, trahison, châtiment, amour, sexe, argent sont au cœur des intrigues. Pour un des plus grands dramaturges comme William Shakespeare ayant écrit aussi bien pour la tragédie que la comédie, leur vie aurait été une source d'inspiration inépuisable. 

 

Il reste de ces protagonistes des peintures, voire des photographies offertes aux regards souvent indifférents des visiteurs. Ensemble nous essaierons de déchiffrer le silence de ces portraits accrochés dans des musées ouatés qui leur sont devenus une seconde nécropole des néants. Ce site ne peut contenir la totalité de leur vie. Mais nous aurons du temps pour découvrir au travers d'anecdotes quelques traits de leur personnalité. Assurément, sous les précieux atours couvrant leur enveloppe charnelle, ces personnages hors du commun, hors du temps, figés dans l'éternité aphasique des musées sont proches de nous. Vous éprouverez peut-être pour certains d'entre eux une certaine profonde empathie.

 

Ce château évanoui, effacé de l'espace urbain parisien (alors qu'il a jadis donné la perspective des Champs-Élysées) nous lui redonnons vie, notamment en ressuscitant des atmosphères. L'association "Bâtisseurs des Tuileries" bien entendu veut aller plus loin : permettre qu'à nouveau le château soit bien identifié dans l'aire qui était la sienne.

 

Afin d'éviter aux lecteurs de se perdre dans des méandres historiques, les articles s'efforcent de présenter brièvement pour chaque phase l'environnement historique, en évitant les flash-back. Les dates ne sont pas à retenir : aucun prix ne récompensera le bon élève qui s'y efforcerait. Elles sont là, simplement comme repères dans le temps. Pourquoi s'en préoccuper ? En revanche, donnez-vous le temps de découvrir ce site.

 

G.Lenotre écrivait "L'histoire de la Révolution est borgne, car sa topographie reste à faire... Combien de fois, en parcourant les pages qu'ont inspirées à Michelet et à Lamartine les sombres journées de la Terreur, j'essayais de reconstituer en esprit, à l'aide de leurs narrations, la salle où siégeait la Convention, les prisons, les Comités... Je me demandais : comment était-ce ? "

 

Pour moi, tout a commencé par une question identique ; comment était le château des Tuileries ? Où situer les évènements racontés par des reproductions ? Un seul exemple. Une reprographie témoigne de la journée du 20 juin 1792. Louis XVI, encerclé par un peuple  vociférant est acculé contre une fenêtre du palais, protégé seulement par 4 gardes du corps. Un de ces derniers dit à son souverain "Sire n'ayez pas peur!". Et le roi très calme, tout en le fixant du regard, de prendre la main droite de son protecteur pour la poser sur sa poitrine, en lui demandant s'il sentait battre son cœur plus vite que la normale. Mais où donc cela s'est-il passé? Dans quelle pièce et à quelle fenêtre? Questions essentielles, non?!

  

Le présent travail, appelé à s'enrichir, donnera ultérieurement plus d'informations sur la topographie, l'aménagement, la décoration.

 

Du château il existe de nombreux tableaux, reprographies, lithographies, photographies... Ici elles serviront à faciliter le travail d’imagination, pour évoquer tel évènement, tel personnage, et pour insuffler vie à cette résidence. Les témoignages et les anecdotes seront utiles pour y replacer divers épisodes, restituer des ambiances, essayer de percevoir les voix des disparus. A vous d'imaginer, leurs rires, leurs espoirs, leur cœur affolé, qui battait plus fort au bruit du roulement des tambours et des canons, au claquement des armes, aux cris du peuple forçant dans le sang le château. Et en amont du glas, toujours le tocsin au rythme mobilisateur et excitant.

 

Comme tout château, les Tuileries avait son fantôme : le petit homme rouge. Certains croient l'avoir aperçu une dernière fois dans les flammes du 23 mai 1871. On dit que des âmes tourmentées hantent les lieux où elles habitaient ; mais il ne reste plus rien in situ des Tuileries pour y accueillir ces apparitions de l'au-delà qui ont imprégné les pierres du château de leurs émotions vibrantes. Donnons, le temps d'une lecture, un asile, à ces spectres sans château.

 

N’étant ni historien, ni universitaire, ni écrivain, votre indulgence est requise. Je le répète, j'ai conscience en toute modestie d'apprendre beaucoup de certains de ses lecteurs. En conséquence, si vous trouvez des inexactitudes, merci d'aider à les corriger. Vos ajouts et précisions sont bienvenus pour enrichir le texte d'éléments nouveaux pour enrichir cette fresque historique.

 

Le silence et l'oubli de l'histoire ont effacé les Tuileries. Maintenant donnons libre cours à notre imagination, créons un univers partagé pour que revivent ceux qui habitaient ce château et les situer dans l'espace de la noble demeure.

 

Acceptez à votre tour d'être envoûté, hanté par le château occulté, le château des vanités, de faire entrer dans votre présent, une part du passé de ceux qui ont osé défier l'avenir en franchissant son seuil.

 

Suite : Résumé historique

 

 

Michel Hourdebaigt

 

Contact : michel.hourdebaigt@gmail.com