Naissance et Renaissance (partie 2)

Des histoires pour écrire l'histoire d'un château !


L'Apocalypse selon Charles Quint

Charles-Quint par Juan Pantoja de la Cruz, inspiré sur Tiziano Vecellio. (Source : English Wiki)
Charles-Quint par Juan Pantoja de la Cruz, inspiré sur Tiziano Vecellio. (Source : English Wiki)

 

Très probablement le courroux du très catholique roi d'Espagne, empereur du Saint-Empire germanique est sans mesure. Dantesque ! On est en droit d’imaginer que le souverain  rêve :
 
- de réduire à la mendicité ce simoniaque  ;

- de frapper à coups de crosse le judas romain ;

- de faire avaler au félon tiaré son extrait de baptême ;

- de baptiser une seconde fois ce petit évêque dans une eau croupie et nauséabonde ;

-de noyer le mécréant cupide dans un bénitier ou d'étouffer le fourbe en enfonçant au fond de sa gorge les plumes de l'archange Saint-Michel.
 
Enfin, sa litanie d'insultes épuisées, l'empereur pense qu'il calmera son ire, une fois qu'il enverra griller en enfer ce faiseur de bondieuseries, ce bouffon de Dieu. En amont, il aura crucifié le faux dévot de ses propres mains.
 
 Le cauchemar pour le prognathe Habsbourgeois  était de savoir ce Médicis infatué, pontifiant avec son air de bienheureux, distribuer ses bénédictions, dans une totale impunité. Il l'imagine poursuivre ses tromperies diplomatiques, sans que, le châtiment de Dieu ne l'ait châtié. Aussi l'empereur qui a pourtant une patience d'ange, pour une fois ne perd pas son temps à attendre une justice divine qui ne frappe pas. Aide-toi et le ciel t'aidera !

Et à chercher un exutoire à la rage froide et noire qui l'habite, il ne tarde pas à mettre sur pied un plan diabolique, devant le laisser pur comme le lys virginal, déposé au pied de la vierge.
 
Les armées célestes lui faisant défaut, il engage un stratège redoutable, Georg von Frundsberg, pour renforcer les troupes espagnoles en difficulté en Italie et donner une bonne leçon aux partisans de la Ligue. Georg von Frundsberg, malade, sera remplacé par le connétable Charles III de Bourbon.

Ici les avis divergent sur l'intention ou pas de Charles-Quint de fondre sur Rome. Selon Gregorio Leti, l'empereur aurait conseillé au connétable de Bourbon de payer ses mercenaires, en prenant à Rome l'or dont il avait besoin. D'autres avancent comme Martin du Bellay et Gregorio Casale, un avis opposé. Pour eux, c'est le connétable de Bourbon qui a eu l'initiative de s'emparer de Rome, pour ensuite monnayer un royaume à la hauteur de ses ambitions. Ici, en se fondant sur un sentiment personnel fondé sur quelques lectures, on imaginera que Charles Quint a bien programmé la prise de Rome pour la livrer a ses nervis. Probablement l'empereur  a voulu renouveler l'exploit du cardinal Pompeo Colonna, sans avoir prémédité la suite dramatique de l'invasion de la ville.
 
On se souviendra, avant de poursuivre, qu'il n'existe pas d'armée nationale. Même si dans "Le Prince", Machiavel met en garde Laurent de Médicis contre l'emploi de troupes mercenaires, le mercenariat est une véritable institution. Ce sont des mercenaires qui souvent composent les troupes des États qui les emploient. Pour ces soldats changer de camp n'est pas un problème : peut importe le maître, l'essentiel est de se vendre et d'être récompensé à sa juste valeur, c'est-à-dire au prix d'une vie.
 
Le commanditaire lui ne s'intéresse qu'à la réputation d'efficacité militaire des hommes qui vont le servir. Bien entendu quand les intérêts de l'employeur convergent avec ceux de l'employé, c'est mieux ! Ainsi l'empereur, le roi très catholique, n'hésite pas à engager des luthériens. Jules Michelet raconte que Georg von Frundsberg avait juré d'étrangler le pape avec la chaine d'or que le vicaire du Christ portait autour du cou.
 
Le connétable de Bourbon, qui a fait prisonnier François 1er à Pavie, est à la tête de trois armées composées de mercenaires germains, espagnols, et Italiens. Le connétable commande en personne 12 à 15 000 reîtres (surnommés cavaliers du diable) et lansquenets (piquiers), mercenaires luthériens ennemis de la papauté. Cette force est appuyée par six mille Espagnols dirigés par le marquis del Vasto et d’Antonio de Leyva (ou Leva), duc de Terranova, prince d'Ascoli. S'additionnent à ce corps expéditionnaire quatre à cinq mille Italiens encadrés par des condottieri (chefs de mercenaires italiens) aux ordres de Fabrizio Maramaldo, Sciarra Colonna et Ferdinand de Gonzague. Enfin, Philibert de Chalon, vice-roi de Naples, prince d'Orange (que nous retrouverons plus tard) est à la tête de mille chevau-légers. Incapable de payer la solde de la soldatesque, et menacé physiquement ppar les mercenaires pour ce manquement grave, le connétable de Bourbon les invite à piller Rome et ses immenses richesses.
 
Affolé, Clément VII est informé de l'avancée préoccupante vers Rome des troupes aux ordres du connétable.
 
L'homme de Dieu, sachant que le "droit canon" risque de s'avérer insuffisant, décide de négocier avec ses ennemis. Les pourparlers semblant satisfaisants, le Saint-Père en toute confiance résilie le contrat des troupes qu'il avait levé en urgence pour protéger Rome. Erreur fatale ! les pourparlers capotent et le connétable reprend sa marche sur la ville sainte.
 
Il ne reste à Clément que de sortir son arme dissuasive, en jetant l'anathème sur ses ennemis. Il excommunie le connétable, ce qui ne ralentit en rien la progression du foudre de guerre, ni sa détermination !
 
C'eût été un miracle que cela marche et le Saint-Père aurait été probablement le premier surpris ! Le vicaire du Christ qui attendait les secours promis par François 1er vient de comprendre que du côté de la France, ni argent ni hommes n'arriveront à temps.
 
Dans son désarroi le pape note que son allié français a plus de jactance que de parole ! Et aux abois, pour la première fois de sa vie, l'homme de Dieu se tourne vers son Créateur et lui adresse des prières désespérées pour éloigner des Romains le danger qu'il pressent.
 
Cela n'empêche pas le 5 mai les corps militaires voués aux enfers par Clément de se rassembler devant les murailles de Rome. Cette ville impie est pour les mercenaires l'assurance de biens matériels inépuisables, or, argent, femmes...
 
Impatients, tout en regardant les hautes murailles de la ville, ils attendent l'ordre d'en escalader les murs et d'en enfoncer les portes. Ils devront faire preuve de patience, car la première attaque échoue.


L'enfer Romain

Château Saint-Ange Caspar van Wittel — Inconnu. (Source : http://bit.ly/1O7WjQ7)
Château Saint-Ange Caspar van Wittel — Inconnu. (Source : http://bit.ly/1O7WjQ7)

Le 6 mai 1527, à la faveur de la brume, depuis son quartier général situé dans le couvent Saint-Onofrio, le connétable  lance ses hommes à l'attaque de la ville.

Au cours de l'assaut, à la Porta del Torrione, alors qu'il escaladait une muraille (l'artiste Benvenuto Cellini revendique l'avoir tué en ayant décoché un carreau d'arbalète) une balle tirée d'un mousquet le touche aux reins et l'envoie au purgatoire.

 

Selon Pierre de l'Estoiles, Charles de Bourbon aurait dit avant de trépasser "Compagnon, je suis mort. Jette vivement ton manteau sur moy, afin qu'on ne me reconnoise, et que ma mort soit cause de faire perdre le cœur au soldat".  La mort de leur chef décuple les forces des soldats qui après s'être emparé de la Porta del Torrione, envahissent la ville. Soudards et pillards y répandent la mort. 

 

El passetto en 2016. Source Guiseppe Larocca.
El passetto en 2016. Source Guiseppe Larocca.

147 Gardes suisses vont se sacrifier (en mémoire de cet épisode, la prestation de serment des Gardes suisses pontificaux est fixée chaque année à cette date anniversaire) pour permettre au pape de fuir vers le château Saint-Ange, par le "passetto di Borgo" (passage discret et protégé à l'intérieur d'une muraille reliant la caserne des Suisses au château Saint-Ange).
 
Accompagné de 42 soldats helvètes commandés par Hercules Göldli, Clément VII assiste du haut des murailles du château Saint-Ange au massacre de la population romaine (soient 40.000 âmes vouées au paradis, l'enfer, voire le purgatoire), au pillage de la ville, à sa ruine. C'est le prince d'Orange qui a pris le commandement des troupes qui pendant plusieurs mois font de Rome un enfer plus terrible que le vrai. 

 

El passetto arrivant au château. Source 2016 Guiseppe Larocca.
El passetto arrivant au château. Source 2016 Guiseppe Larocca.

Le cardinal Pompeo Colonna qui est arrivé à Rome pour parader devant le château Saint-Ange, est horrifié de ce qu'il voit et tente de soulager le plus de victimes possible, sans s'attacher à connaître leur camp. Pendant deux mois, rien n'est épargné, jusqu'aux tombeaux des papes qui sont profanés. La ville ne sera évacuée par les troupes d'occupation qu'en février 1528.
 
Le sac de Rome fait l'effet d'un cataclysme. Dans l'imagination fantasmatique, la ville est devenue un enfer pour les vivants, plongés dans des misères extrêmes. Pour les baptisés, Rome qui compte plus de morts que de vivants est devenue un cimetière à ciel ouvert. Et l'âcre odeur des morts s'imprègne de celle des incendies et de la mitraille.
 
Cet évènement  impensable ne laisse personne indifférent. Le monde catholique est en général atterré, choqué, révolté par l'apocalypse qui a frappé la cité martyre. Même si les mœurs licencieuses romaines induisaient de nombreuses critiques !


1527, Annus horribilis

Saint Michel sur le château Saint-Ange. (Source : F l a n k e r).
Saint Michel sur le château Saint-Ange. (Source : F l a n k e r).

Paradoxalement, le pire ennemi des protestants, le roi très catholique, partage l’allégresse de ces derniers. Mais pour des convenances politiques et morales, il reste de marbre. C’est secrètement qu’il jubile, béat comme un ange au paradis. D'autant plus béat que la nouvelle lui parvient vers le 15 mai à Valladolid, et le 31 mai naissait son fils. Comment donc douter que la reconnaissance de Dieu ne se soit exprimée en sa faveur !?

 

Charles-Quint ne s'appartient pas et n'appartient à personne. Inaccessible comme l'étoile du Nord, dans sa grandeur, il ne peut ni partager ses sentiments avec des humains qui ne sont pas ses pareils, ni les montrer ; ni au final s'y adonner.

 

En apprenant les mésaventures du traître papal, on peut imaginer qu'il se serait autorisé, dans le secret de ses appartements, une danse endiablée, extatique, solitaire, effrénée ; mais même dans l'intimité de son espace privé, cela aurait été absolument incompatible avec sa dignité impériale et royale. L'empereur masque son euphorie notamment au corps diplomatique tentant d’évaluer le degré de son bonheur.

 

Derrière son masque habituel sombre et flegmatique, il ne laisse rien transparaitre. Mais nul n'est dupe et ses silences sont largement commentés !

 

L'empereur en bon politique s’absout de toute responsabilité dans le cataclysme infernal que le connétable de Bourbon a déclenché sur la Rome. Il en condamne la prise, et fait observer cependant que Clément VII a une coresponsabilité dans le drame qui s'est joué en Italie.

 

L'empereur pousse l'hypocrisie jusqu'à prouver qu'il est incapable de peser d'une manière ou d'une autre pour venir en aide au pontife. Aussi il ordonne aux peuples de son vaste empire de se joindre à ses ferventes prières pour que le pape retrouve sa liberté ; la cour imitant le monarque prend le deuil. Mais rien ne nous interdit de penser que dans un profond élan de reconnaissance, Charles Quint, orant aux mains jointes, n'ait envoyé à son Dieu vengeur de ferventes prières de reconnaissance.


Tragédies romaines

Sac de Rome. (Source : Musée Victor Balaguer maig de 2011 Wikimedia Commons by Biblioteca Museu Víctor Balaguer as part of an ongoing cooperative GLAMWIKI project with Amical Wikimedia)
Sac de Rome. (Source : Musée Victor Balaguer maig de 2011 Wikimedia Commons by Biblioteca Museu Víctor Balaguer as part of an ongoing cooperative GLAMWIKI project with Amical Wikimedia)

C'est à Florence où elle vit que Catherine (qui a 10 ans au moment des faits) apprend que mille fléaux et calamités se sont abattus sur Rome.

 

Au travers de la réclusion du pape au château Saint-Ange, Catherine découvre notamment la fragilité du pouvoir, que les princes n'ont pas toujours le contrôle des évènements. Sa première leçon politique !

 

La fillette tremble aux récits épouvantables décrivant la ville calcinée, livrée à des mercenaires luthériens hérétiques et catholiques impies, qui ont osé fouler le marbre des palais du pape, souillé la maison de Dieu. Elle sait que l’Ange de la mort a fauché les âmes des bons et des mauvais, sans distinction.

 

On est en droit d'imaginer qu'elle se représente le Tibre de la même couleur que les rivières de sang de Bethléem, rouges du sang des enfants de moins de deux ans, tués sur l’ordre d’Hérode, de leur parent, frères et sœurs se sacrifiant pour tenter de sauver ces innocents. Un Tibre qui trop gonflé du sang des Romains, serait prêt comme au temps de Noé à tout submerger.

 

Certainement Catherine impressionnée se rassurait en pensant que l'horreur était loin d'elle : elle se trompait ! Mais avant de nous arrêter sur la suite des évènements, lisons une description du sac de Rome, un témoin qui s'appelle Bonaparte.


Le sac de Rome

Le sac de Rome par Martin van Heemskerck (1555). (Source : Wikipedia)
Le sac de Rome par Martin van Heemskerck (1555). (Source : Wikipedia)

Le prince Napoléon-Louis Bonaparte (frère ainé du futur Napoléon III, décédé en 1831 lors du siège de Forlì) a traduit le témoignage de son ancêtre, le prêtre Jacopo Buonaparte. La dédicataire de son opuscule était la princesse Zénaide Bonaparte, princesse de Musignano. La traduction de cette relation historique est pour Napoléon-Louis Bonaparte l'occasion de rappeler les faits et gestes historiques de son illustre famille. 

 

Le prince précise toutefois avoir omis beaucoup de détails dans son ascendance, car il pense que "des titres de noblesse ne sont un objet de curiosité que pour un petit nombre de personnes, et d' ailleurs la famille Bonaparte n' en retirerait, à ses yeux, aucun lustre ...."

 

Et de conclure :

 

"Qui sert bien son pays n'a pas besoin d’aïeux".

 

La généalogie qu'il rappelle à des fins politiques étant trop longue, nous suivons son conseil  :

 

"Ceux des lecteurs, que cette courte description généalogique pourrait effrayer, sont priés de passer de suite au sac de Rome".

  

(Source : http://icp.ge.ch/po/cliotexte/xve-et-xvie-siecle-renaissance-humanisme-et-reforme/sac.rome.html).

 

Château Saint Ange. Source 2016- Guiseppe Larocca.
Château Saint Ange. Source 2016- Guiseppe Larocca.

« L'armée, renonçant au siège du fort [Château Saint-Ange], se divisa en plusieurs corps et se porta sur différents quartiers. Elle apercevait à son passage les pères et les mères de famille, placés au seuil des palais ou à l'entrée de leurs maisons, désolés de la perte de leurs enfants tués dans le combat, et consternés des malheurs qui menaçaient encore leur misérable cité. Ces infortunés, vêtus de leurs habits de deuil, offraient aux ennemis leurs maisons, leurs meubles, tous leurs biens, et fondant en larmes, demandaient d'une voix suppliante qu'on leur fît grâce de la vie. Ces prières touchantes ne pouvaient fléchir le cœur de ces féroces soldats ; comme si le son des tambours et des trompettes les eût animés au carnage, ils se jetèrent le fer à la main sur ces malheureux, en firent un massacre horrible, et sans distinction d'âge, de sexe, ni de lieu, égorgèrent tout ce qui s'offrait à leur vue. Les étrangers ne furent pas plus épargnés que les Romains, parce que les meurtriers tiraient indifféremment sur les uns ou les autres, sans autre motif que la soif du sang. Exaspérés par la mort de leur chef [le connétable de Bourbon], ils se souillèrent de cruautés dont l'Histoire offre à peine d'autres exemples. Ne trouvant plus personne qui leur fît résistance, ils devinrent en peu de temps complètement maîtres de cette antique et noble cité, où se trouvaient accumulés des trésors tels qu'ils eussent suffi à l'armée la plus avide de pillage.[...]

 

De leur côté, ils [les troupes allemandes] se mirent à arrêter les passants ou les Romains qu'ils trouvaient sur le seuil de leurs portes et qui leur demandaient merci ; ils les contraignaient à leur ouvrir leurs appartements, d'où ils emportaient ensuite tout ce qui était à leur convenance.

 

Ils ne se bornèrent pas à ces vols ; ils violèrent indifféremment toutes les femmes qu'ils rencontraient. [...]

 

Les maisons particulières n'étaient pas le seul théâtre de ces scènes abominables ; elles se passaient encore dans les temples saints, dans les chapelles consacrées à Dieu, où des dames et demoiselles de tout rang, jetant des cris perçants et fondant en larmes, s'étaient réfugiées, pleines d'espérance dans la protection divine. Maintenant aucune force humaine ne pouvait les mettre à l'abri du danger. Elles y furent découvertes par les hérétiques auxquels se joignirent bientôt les Italiens, et essuyèrent même traitement que dans les habitations particulières. [...]

 

Les couvents de religieuses ne furent pas plus épargnés que les églises. Ces audacieux contempteurs des objets respectés par les fidèles entrèrent comme des loups enragés dans une bergerie, et transformèrent ces retraites sacrées en un lieu de débauche, où ils assouvissaient par les obscénités les plus révoltes leur atroce brutalité. Ils mettaient le feu partout où les habitants faisaient mine de se défendre. [...].

 

Lorsqu'ils eurent un peu apaisé leur soif de sang, ils portèrent leur attention sur les immenses richesses des lieux saints. Les luthériens, qui composaient en grande partie cette armée, pouvaient ne se croire tenus à aucune espèce de ménagements. À peine avaient-ils mis le pied dans une église, qu'ils portaient leurs mains ensanglantées sur les calices, images, croix ou vases précieux qui frappaient leurs regards. S'ils trouvaient des reliques, ils les jetaient par terre d'un air de dédain. (...) Ils détachaient des murs les images des Saints qui les ornaient, pour les salir, les déchirer ou les brûler. Ils barbouillaient les peintures à fresques. Quelques-uns d'entre eux allèrent dans les sacristies se revêtir des habits sacerdotaux, et, montant sur l'autel, ils officiaient par dérision comme des ministres de la religion ; seulement au lieu de prières, ils proféraient d'horribles blasphèmes. »

 

(Sources : http://icp.ge.ch/po/cliotexte/xve-et-xvie-siecle-renaissance-humanisme-et-reforme/sac.rome.html &

Jacques Bonaparte.Sac de Rome au temps du pape Clément VII de Médicis, en 1527, par un gentilhomme de San Miniato par Jean-Alexandre Buchon. Choix de chroniques et mémoires sur l'histoire de France.Paris,1836.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5730051t)


Le Christ, roi de Florence.

Philibert de Chalon. (Source : http://bit.ly/1M7fxqu)
Philibert de Chalon. (Source : http://bit.ly/1M7fxqu)

Le 6 juin 1527, le pape est contraint de signer la paix avec Philibert de Châlons, prince d'Orange, qui remplace le connétable. Le pontife cède à l'empereur les forteresses de Civita-Vecchia, de Civita-Castellana, d'Ostie. Il lui laisse aussi les villes de Piacenz, de Plaisance, de Parme et de Modène. En attendant que ces exigences soient respectées, le pape est "cloîtré" de force dans le château Saint-Ange avec 13 cardinaux et verse 400 000 ducats d'or au prince d'Orange.

 

Clément n'oubliera jamais la leçon de Charles-Quint. Par crainte de l'empereur, le pontife n'accordera jamais à Henri VIII l'autorisation de divorcer de Catherine d'Aragon, tante de Charles-Quint ce qui ouvrira un schisme se traduisant par la séparation de l’Église d'Angleterre.

 

La chute de Rome a une incidence directe à Florence. La ville administrée pour le compte des Médicis par l'incapable cardinal Silvio Passerini de Cortona est agitée de troubles contre les Médicis.

 

Lucide et courageuse, Clarice tente de redresser le gouvernement médicéen. Elle reproche au Cardinal Passerini sa politique irresponsable, et à ses deux neveux Alexandre et Hippolyte leur comportement peu conforme avec leur dignité princière.  Clarice chasse  le premier et presse les seconds à s'enfuir. Elle-même et la fillette restent à Florence. Le 16 mai 1527, la révolte contre l'illustre famille est achevée. Florence se proclame république et l'alliée du roi de France.

 

À l'initiative du gonfalonier Niccolò Capponi, le Christ est proclamé roi de Florence.

 

 

JESUS CHRISTUS, REX FLORENTINI POPULI,

 

S. P. DECRETO ELECTUS.

 

 

Qui oserait détrôner le fils de Dieu ?

 

Si les nouveaux maîtres de la ville conservent aux Médicis l'exemption d'impôts, le droit de résider à Florence, le sort des deux femmes ressemblera rapidement au sort réservé aux otages de choix. Dans un premier temps Catherine est conduite à la Villa Médicis de Poggio a Caiano. Puis, au prétexte de la protéger, accompagnée de sa tante, Catherine est remise aux sœurs dominicaines de Santa Lucia, hostiles aux Médicis. La fillette sent clairement l'hostilité de ces saintes femmes. La mort de sa tante Clarice Strozzi le 3 mai 1528 la laisse seule face à son destin.

 

La « duchessina » est sauvée par la peste qui frappe aux alentours du couvent. Pour ne pas perdre un otage si précieux, il est décidé de la transférer dans un endroit éloigné de la zone de l'épidémie. C'est ainsi que Catherine est mise à l'abri chez des sœurs bénédictines, favorables aux Médicis. Dans le couvent des Murates (couvent des cloîtrées) la fillette coule des jours heureux, couvée par l'ensemble des religieuses (l'abbesse du couvent des Murâtes avait été témoin au baptême de Catherine. Servie par deux femmes dans la cellule que Catherine Sforza s'était fait construire, les religieuses tentent de lui faire oublier qu'elle demeure l'otage de Florence.


Rome-Orvieto : le chemin de la rédemption

Siège de Florence, par G. Vasari.Palais Vecchio. (Source : Abbeville Press)
Siège de Florence, par G. Vasari.Palais Vecchio. (Source : Abbeville Press)

Dans la nuit du 8 au 9 décembre 1527, grâce à la connivence espagnole, le vicaire du Christ, "démitrée" et tête basse, déguisé en marchand ambulant, sort discrètement du château Saint-Ange.

 

Son acte de contrition a été à la hauteur de sa faute, pour que Charles-Quint soit complice de cette "fugue". 

 

Sous la protection de Louis de Gonzague commandant une compagnie d'arquebusiers espagnols,  Clément VII gagne Orvieto. Charles-Quint, probablement assuré que le chemin de Rome à Orvieto a été pour le bonimenteur papal celui de la rédemption, devient plus clément. Plus intéressé qu'oublieux, il se réconcilie officiellement avec l'histrion politique romain. Il faudra attendre cependant le 16 février 1528 pour que les troupes qui occupaient Rome partent. Elles laissent derrière elles la vision d'une ville post apocalyptique. Mais Clément VII n'oublie pas Florence.

 

Le 23 février 1530 (date anniversaire de Charles-Quint) l'empereur est couronné par le pape, avec la couronne de fer, empereur des Romains à Bologne. Charles-Quint n'avait pas on l'a compris besoin d'ascenseur social, ou d'aide pour une surélévation de plus. Mais ce sacre (la cerise sur le gâteau ou la couronne sur la tête) était indispensable pour qu'il soit indiscutablement le souverain du Saint-Empire Romain Germanique.

 

En échange de sa soumission absolue, le pape demande entre autres à Charles-Quint de l'aider à reprendre Florence, cité élevée par Charles-Quint au rang de duché. Clément donne en mariage son bâtard Alexandre (titré pour la circonstance duc de Civita di Penna par Charles-Quint) à la fille naturelle et bien-aimée de l'empereur, l'archiduchesse Margaret d'Autriche, âgée de 7 ans. Le pape déshéritant Catherine, octroie à Alexandre tous les droits des Médicis sur Florence (il ne sera proclamé duc qu'en 1532 ; à la fin du mois d'avril 1536, l'empereur "honorera" Florence de sa présence).

 

En juillet 1530, Florence est assiégée par le jeune Philibert, prince d'Orange, qui après avoir participé au sac de Rome, retenu prisonnier le pape, se met à son service. Participent au siège des troupes hispanopapales. Pendant 10 mois les mercenaires de Philibert d'Orange  ruinent la Toscane, histoire de compléter leur modeste solde. Bien entendu le pape avait accordé son absolution à ceux qui avaient saccagé Rome et étaient passés dans son camp pour faire plier Florence.

 

Le 19 juillet 1530, le chancelier de la république Salvestro Aldobrandini chancelier et secrétaire  de la Seigneurie, accompagné de trois commissaires et  d'hommes armés  vient chercher Catherine pour la transférer dans un autre couvent. Le couvent terrorisé du devenir de l'enfant tente de s'opposer à ce rapt. La fillette et les religieuses sont obligées de s'incliner le lendemain, mais Catherine pour montrer qu'on l'enlève à son couvent, s'est rasée et a pris le voile. C'est donc une nonne qui arrive au couvent de Santa Lucia. Elle n'y est pas traitée avec déférence, ni victimisée.

 

Florence abandonnée de tous décide de résister. Michel-Ange étant chargé de la défense des remparts, tandis que le valeureux condottiere (chef de mercenaires italiens) Francesco Ferrucci organise l'armée florentine. Un membre de la Seigneurie de Florence, envisage d'attacher Catherine nue entre deux créneaux des murailles "offertes" comme cible aux boulets des assiégeants. Un autre membre de la noble assemblée propose d'offrir la fillette, dernier rejeton légitime de la lignée des Médicis au viol des mercenaires. D'une pierre, deux coups : on déshonore l'illustre famille florentine et si l'enfant survit, on la confie à un bordel. En  réduisant à néant ses chances de mariage, on éteint à travers elle la branche ainée de la famille.


Rome ressuscitée

Alexandre le Maure.Collection J. G. Johnson. (Source : Wikipedia)
Alexandre le Maure.Collection J. G. Johnson. (Source : Wikipedia)

 

[...]. Ah ! Monsieur, quelle satisfaction pour un chrétien que ces pompes magnifiques de l’Église romaine ! Quel homme peut y être insensible ? L’artiste ne trouve-t-il pas là le paradis de son cœur ? Le guerrier, le prêtre et le marchand n’y rencontrent-ils pas tout ce qu’ils aiment ? Cette admirable harmonie des orgues, ces tentures éclatantes de velours et de tapisserie, ces tableaux des premiers maîtres, les parfums tièdes et suaves que balancent les encensoirs, et les chants délicieux de ces voix argentines, tout cela peut choquer, par son ensemble mondain, le moine sévère et ennemi du plaisir. Mais rien n’est plus beau, selon moi, qu’une religion qui se fait aimer par de pareils moyens. [...].Lorenzaccio. Acte II. Alfred de Musset.

 

 

Le 3 août 1530, le prince d'Orange à vingt-huit ans meurt au cours du siège, mais sa mort ne change rien au projet du pape et de Charles-Quint. Florence doit tomber. Le 10 août 1530, Florence capitule et revient dans le giron des Médicis. Alors que les nuages effilochés de noir de la mitraille et des incendies se dissipent, que l'âcre odeur du sang des blessés s'estompe, la mort poursuit son funèbre cheminement. La vengeance d'Alexandre de Médicis dit Alexandre le Maure est terrible et Florence épuisée courbe l'échine. Catherine quitte le enfin le couvent de Santa Lucia.  En octobre 1530, la riche héritière  rejoint l'oncle Clément VII. Passer de Florence à Rome, c'est à ce moment précis passer de l'enfer au paradis !

On l'a compris l'indigne successeur de Saint Pierre et d'Adrien VI est tout à la fois, un esthète, un collectionneur, un riche mécène protecteur des arts et des lettres (aujourd'hui, sans privilège il aurait obtenu les palmes académiques). Et après le sac de Rome, la destruction notamment des palais, des églises, couvents, des marbres, des peintures...l'œuvre à accomplir est immense pour relever la ville de ses ruines et restaurer son éclat. Beaucoup d'artistes ont fuit engendrant le maniérisme dit Romain. Mais beaucoup reviennent et répondent présents quand le très Saint-Père les appelle. Ainsi cet aréopage d'artistes propagandistes s'efforce de rétablir le nom des Médicis, de renouer avec la tradition d'une papauté triomphante, pleine de magnificence, et de faire de Rome une capitale de l'Art.


Comment les caisses pontificales peuvent-elles tenir un tel programme dispendieux, au rythme accéléré ?! l'agiotage religieux est cœur du système ! les
offrandes et versements des croyants superstitieux, les bénéfices ecclésiastiques...

 

En attendant de ressusciter la suprématie pontificale, de se rejouer de Charles-Quint, de venger l'outrage fait à la papauté, Clément VII politiquement prudent se cantonne a priori à conduire une politique culturelle ambitieuse. Pour ce politique les artistes sont les thuriféraires du pouvoir papal. Mais Clément n'a délaissé que très provisoirement sa diplomatie secrète !.

 

Rome ! Tous les chemins y menant, enthousiastes les  artistes, poètes, hommes de lettres, savants, intellectuels, penseurs....en processions retrouvent la route de Rome où les commandes dépassent largement le nombre de grains de 100 000 chapelets.

 

Catherine et son cousin Hippolyte (se donnant à la poésie) s'installent avec Alexandre au Palazzo Madama, appartenant au Médicis (actuel palais du Sénat) où réside Lucrèce Salviati, fille de Laurent le Magnifique.

 

À proximité du Saint-Siège Catherine, la bonne élève de la classe,  poursuit une éducation raffinée, visant à la conduire à l'excellence de l'excellence.

 

La vie à la cour papale est dispendieuse, ostentatoire. À côté des solennelles cérémonies officielles, ce n'est qu'une suite de festivités (parfois religieuses), de réjouissances, de festins et de pompes extraordinaires. Tandis que Catherine est tout à la découverte des chefs-d’œuvre de la nouvelle Rome, a priori sensible au charme d'Hippolyte de Médicis, Clément VII de Médicis revient à des projets matrimoniaux diplomatiques secrets incluant Catherine.

 

Hippolyte qui pense à raison que les Florentins le préfèreraient comme duc à Alexandre (connu notamment pour ses brutalités gouvernementales) qui n'avait aucune ambition  l'ecclésiastique, est élevé à moins de 20 ans à la dignité cardinalice et est éloigné de Rome. Selon l'ambassadeur Vénitien Antonio Soriano, il se serait bien défroqué pour épouser Catherine. Plus certainement par intérêt que par amour (source :  La jeunesse de Catherine de Médicis par A.de Reumont, ancien ambassadeur plénipotentiaire de S.M. le roi de Prusse).

 

Le même ambassadeur nous a laissé un portrait de Catherine " La Duchesse est dans sa treizième année; elle est très-vive, montre un caractère affable et des manières distinguées. Elle a reçu son éducation auprès des nonnes de Florence de l'ordre des Murate, femmes d'une réputation excellente et d'une sainte vie. Elle est petite de stature et maigre; ses traits ne sont pas fins, et elle a les yeux saillants, comme la plupart des Médicis".


Un jour mon prince viendra

Mariage d'Henri et de Catherine.Vasari. (Source : http://bit.ly/1MvCQIs)
Mariage d'Henri et de Catherine.Vasari. (Source : http://bit.ly/1MvCQIs)

Après avoir bien étudié la suite à réserver à l'avenir de Catherine, Clément VII est conduit à revenir à son pêché premier : l'alliance française. L'homme de Dieu en fixe le prérequis : la livraison d'une vierge ! Clément s'entend donc avec François 1er pour que Catherine épouse le second fils du roi, Henri, duc d'Orléans, qui selon Brantôme "estoit beau Prince, encore qu'il fust tin peu mouricaud".

 

Accoler le blason médicéen à côté des trois lys de France, voilà qui tenait du pêché d'orgueil. Mais nous savons que Clément VII était maître dans l'autoabsolution. Et puis, ayant interprété à sa façon la parabole évangélique des talents, le pape s'est dit que ce mariage a fait de lui un bon serviteur, ayant contribué à renforcer les liens avec un roi puissant, ayant tout intérêt à protéger les États pontificaux.

 

Le chef suprême de l’Église, catholique avait donc quitté ses fausses dévotions pour entamer des pourparlers matrimoniaux. Dans cette affaire, les négociations étaient secrètes et le pontife avançait sur des hosties, comme d'autres marchent sur des œufs. Les transactions conclues, les deux alliés décident benoîtement de s'en confesser auprès de Charles-Quint. L'empereur probablement n'ignorait rien des tractations francopapales et avait préparé le terrain.

 

Il impose au pape une série de conditions non négociables, comme la réunion d'un concile pour juguler les divisions religieuses de son empire Romain Germanique. Toujours à titre d'exemple, il pousse Clément VII à rejoindre une alliance contre les Turcs. Concernant la paix en Italie, Charles Quint s'emploie à neutraliser le pape en l'empêchant de chercher des alliés ; lui- même prend des engagements en ce sens.

 

Le 1er septembre 1533, Catherine quitte Florence et fait, accompagnée de son oncle, une entrée solennelle le 12 octobre suivant à Marseille. François 1er  les y accueille en personne, entourée de la cour.

 

Pour Yvan Cloulas, celle-ci y était au grand complet, y compris les "ribaudes".

 

Mais qu'elle est donc l'utilité de filles de joie à la cour d'un roi chevaleresque ? Ces belles peu farouches suivent les seigneurs français, pour calmer une certaine "spontanéité" peu conforme au respect tout civilisé dû aux dames. Une lettre de François 1er en date du dernier jour du mois de mai 1540, adressé à son trésorier Jean Duval, atteste que les filles de joie étaient payées par le roi, et que les liens de ces dernières avec sa cour étaient étroits. Elle concerne un paiement à faire à Cécile de Viefville, la maquerelle titrée.

 

"Nous voulons et nous vous demandons que des deniers de nostre épargne, vous payez, baillez et délivrez comptant à Cécile de Viefville, dame des filles de joie suivant notre cour, la somme de 45 livres tournois [...]."

 

Le 28 octobre 1533, à 14 ans, comblant les visées diplomatiques de son oncle, Catherine est unie au second fils du roi François 1er.

 

Les Français ne voient pas d'un bon œil ce mariage,  [...] et on blâma le roi d'abaisser ainsi la couronne sur une maison qui passait du comptoir au trône"(source La promenade aux Tuileries.Peytieux, libraire galerie Delorme ; Le Filleul.1822.Gallica-BNF).

 

Le site Cour-de-france.fr cite le témoignage d'un contemporaine, vivant à Marseille : témoignage de Honorat de Valvelle.

 

Catherine, qui a trouvé son prince charmant, ne se préoccupe probablement pas de cette sorte de commentaires ; hélas pour elle, l'histoire qui suit n'a rien d'un conte de fées.

 

Ah ! si le prince au moins avait été gay, elle aurait pu rêver de devenir son amie !


La chasseresse

Le dauphin Henri.Source Wikimedia.http://clouet.dessins.free.fr/galerie.htm
Le dauphin Henri.Source Wikimedia.http://clouet.dessins.free.fr/galerie.htm

Henri, que Joachim du Bellay décrit le fils puîné du roi comme ayant un "[...] visage estoit doulx, meslé de gravité" est prisonnier. Voilà pour le physique. Quant à son cœur, il est depuis bien longtemps pris dans les rets de la belle Diane de Poitiers. En un mot Henri supporte mal cette adolescente qui lui a été imposée, qui de son regard globuleux et trouble lui fait les yeux doux. Elle pourra l'attendre désespérément seule chaque soir, dans le mitan de la couche royale, couverte de teille blanche !

 

Diane, qui a 20 ans de plus que son royal amant entre visage de madone et chasseresse à l’œil de biche est d'une beauté évanescente qui trouble, transforme et comble Henri. La favorite, bien plus expérimentée dans les choses de l'amour que cette gamine aux yeux exorbités, appelle Henri à un corps à corps. Puis un cœur à cœur, quand le corps de Diane toujours accueillant invite le prince au repos.

 

Catherine est isolée au milieu d'une cour où seuls les conseillers du roi lui témoignent de quelques déférences. Une réelle complicité unit François 1er à Catherine, son seul allié. Le 10 août 1536, François de France, fils ainé de François 1er meurt. Henri le fils cadet devient donc à son tour dauphin. Certains pensent que la mort du dauphin François a été préméditée par Catherine. Serait-ce son premier crime ? Beaucoup y ont cru.

 

Le sort est encore là pour s'acharner sur elle. Au sein du couple delphinal, Catherine n'assume pas sa mission première : donner un héritier au royaume. Pour cela elle peut être renvoyée, le royaume ayant besoin d'un dauphin, et sur ce point, François 1er ne transigera pas en sa faveur. 

 

Couple, duo et trio

Diane. Workshop of François Clouet [Public domain], via Wikimedia Commons
Diane. Workshop of François Clouet [Public domain], via Wikimedia Commons

Paradoxalement, chaque membre du trio partage le même objectif : Catherine doit rester.

 

Catherine doit enfanter, pour rester reine. Diane craint le renvoi de Catherine ! en effet, cette dernière sera remplacée par une princesse, pour tenir compte de la qualité de dauphin de son amant. Et il n'est pas certain que Diane et Henri puissent agir avec la même désinvolture avec la fille d'un roi, voire d'un empereur.

 

Diane a donc tout intérêt à ce que Catherine conserve son statut d'épouse royale, d'autant plus que cette dernière ne se révolte pas. Une princesse n'aurait certainement pas une attitude si soumise, qu'a adoptée la descendante "des boutiquiers", au mieux des marchands doublés de banquiers ayant réussi dans la finance.

 

Henri quant à lui, fasciné par Diane et satisfait d'une épouse fermant les yeux sur ses infidélités, n'a nullement envie de perturber une triangulation équilibrée qui lui convient bien. Catherine refuse avec horreur l'idée de devoir quitter la Cour fastueuse des rois de France pour une vie de méditation dans un couvent, loin d'Henri.

 

L'étrange trio va s'attacher à résoudre le problème.

 

En réalité c'est Henri, qui victime d'une malformation pénienne (hypospadias) est le seul responsable. Une opération remédiera au problème. Une fois l'affaire réglée, Diane pousse le roi dans le lit de son épouse et se dispense de tenir la chandelle.

 

Le 19 janvier 1544, onze ans après son mariage, Catherine donne au royaume un dauphin, le futur François II. 9 enfants, dont seulement 6 survivront.

 

 Catherine a échappé au couvent et un jour, elle sera reine de France. Ascension remarquable pour le rejeton d'une famille de banquiers ! Mais Catherine demeure otage d'attaches amoureuses pour un roi qui ne l'aime pas !